Elle n'est plus l'ombre que d'elle même, la ténébreuse, le corps abimée par les affres d'une maladie sur laquelle elle n'a pas le moindre contrôle. Le chaud et le froid se bataille sa carcasse livide, alors que la douleur tambourine furieusement contre ses tempes. Elle se recroqueville en les draps, cherche a chaleur de cet autre corps qu'elle sent à proximité. Elle ne sait pas, elle ne sait plus, anesthésier par une fièvre virulente, elle est à demi consciente. Elle laisse échapper un soupire plaintif alors qu'elle ferme un peu plus les paupières, essayant furieusement d'échapper aux lueurs du jour qui s'invitent à travers les rideaux, s'incrustant jusqu'à son visage. Elle n'est plus elle-même, l'enfant terrible des eaux, terrassée par le poison virale qui s'insinue sournoisement dans ses veines, elle n'a plus d'attache au monde qui l'entoure, elle se laisse ensevelir dans ses songes, sans essayer de s'en échapper. Elle n'a pas suffisamment de force pour combattre son existence. Un soupire, un nouveau soupire, elle enfuit son visage sous les couvertures, vient le nicher contre ce corps bien trop proche du sien. Elle inspire, profondément, chaque bouffée d'air avalé lui brûle douloureusement les poumons. Les rêves se mêlent à une réalité. Elle entend sa voix, elle sent presque son souffle chaud venir chatouiller délicieusement sa peau... Mais ce n'est pas le sien, c'est celui de cet autre.

Elle oublie où elle se trouve. Elle oublie avec qui elle se trouve. Elle est ailleurs, au delà de l'espace et du temps, au delà de la rancœur accumulée, dans des ténèbres qui vous dévore. Elle oublie, pauvre sotte, elle n'a pas l'esprit suffisamment clair pour se souvenir de ces derniers mois. Elle, lui, mais ce lui n'est pas Lex, ce lui, c'est Seren. Le gosse du démon, le fruit de ses entrailles, sa chaire, son sang... Il n'est pas lui, c'est tout ce que tu devrais retenir... Et pourtant, cette pensée s'échappe, tu t'accroches à l'espoir de retrouver le père, sans te rendre compte que c'est le fils qui se trouve à tes côtés. Aucune faute, aucun péché, deux corps endoloris qui s'abandonne aux bras de Morphée, abîmée par la fatigue que la maladie leur inflige. Ce n'est que quand elle vient glisser sa main dans celle du jeune homme qu'elle se rend compte de son erreur, parce que les doigts qui glisse contre ses paumes ne sont définitivement pas les mêmes que ceux qui ont tant de fois parcouru son corps. Elle se fige, la cruelle tentatrice, elle n'ose pas retirer sa main, mais elle ne peut pas rester ainsi. Elle est prise dans un piège dans lequel elle s'est elle-même enfermée. Elle redresse le visage alors que ses paupières papillonnent, s'ouvrent pour croiser les orbes du dernier des Osanos. Elle ose à peine respirer, Hettie, elle n'ose pas être trop brusque apr crainte de le froisser, mais elle ne peut pas être là, avec lui, pas comme ça. Et pourtant, son corps meurtri n'aspire qu'à demeurer ainsi, peu importe qui se trouve à ses côtés. J'ai dû m'endormir, je suis désolée. Qu'elle murmure à peine. Sa mâchoire se crispe, car la douleur revient frapper à l'intérieur de son crâne. Comment tu te sens?

Elle est perdue, Hettie, perdue dans le fil de ses pensées, embrumée par les affres d'une maladie qui la cloue sur place. Elle n'est plus réellement elle-même. Elle sent son corps endoloris de douleur se presser contre le sien, alors que le sale môme vient glisser ses bras pour encercler son corps, l'attirer contre lui. Les paupières viennent se refermer sur ses orbes brûlantes alors qu'elle vient se blottir contre son torse. Elle sait qu'elle ne devrait pas, que ce n'est pas juste, mais elle est fatiguée, épuisée, trop abîmée pour réfléchir, pour résister. Elle ne fait rien de mal, la ténébreuse fille des eaux, mais elle ne fait rien de bien non plus en s'abandonnant ainsi à l'enfant des océans. Je ne sais pas. La voix n'est qu'un murmure teinté de souffrance et de douleur, un râle caverneux, déchiré par la maladie qui le cloue au lit. Elle s'inquiète, la furieuse brune, son visage se soulèvent, ses yeux vitreux venant chercher les orbes brumeuses du fils des océans. Elle le toise, attentive, elle cherche, le moindre signe, la moindre faiblesse, alerte à la moindre menace qu'elle peut décelé chez lui. Il ne peut rien lui arriver, non, pas à lui, certainement pas à lui. Elle ne se le pardonnerait pas. Elle ne lui pardonnerait pas. Ses doigts quittent la chaleur de sa peau, de ses draps, pour venir glisser contre son visage, se poser contre son front brûlant. Elle dégage quelques mèche de son visage, avec douceur. Elle est là pour lui. Merci. Ce n'est rien. Tu fais beaucoup. Déjà. Elle voudrait faire plus, tellement plus, elle voudrait pourvoir le soulager des maux qui le rongent furieusement de l'intérieur. Elle en oublie presque ses propres démons, qui tambourinent furieusement contre ses tempes, laissant perler la sueur contre son front. Le froid et le chaud se mêlent, curieusement, se partageant le corps malade de la guerrière. Elle soupire, serre un peu plus la main qu'elle tient toujours dans la sienne. Elle devrait quitter son lit, le fuir, mais elle n'a pas la force de soulever son propre corps, la simple idée de se relever lui file la nausée. Et toi ? Les yeux réapparaissent derrière le voile de chaire, alors qu'un sourire faiblard vient glisser sur les lèvres de la belle. Une main contre sa joue, l'autre toujours dans la sienne. Tu ne devrais pas avoir à t’inquiéter pour moi. Non, elle était celle qui devait le protéger, pas le contraire. Elle ne sait pas quoi lui dire, elle voudrait trouver les mots, pour le rassurer, pour l’apaiser, mais elle ne sait pas, la Woffhart, parce que ce n'est pas dans sa nature d'être maternelle. Elle s'essaye, elle tâtonne, elle ne sait pas que ses gestes pourraient être mal interpréter. Elle réajuste sa position, sa main quitte la sienne pour venir se glisser dans son dos, caresse apaisante. Tu devrais te reposer, reprendre des forces...La voix s’éteint, écorchée vive. Sa tête bascule, son front vient se poser contre celui du jeune homme. Ca ne devrait être que l'histoire de quelques jours. Elle espère. Elle ne sait pas, elle n'a jamais connu ça. Ce n'est pas seulement lui, mais elle, qu'elle essaye de rassurer en tenant ce genre de propos.

Elle lutte, la furieuse fille des eaux. Son corps se crispe, se tend, alors que la douleur s'empare d'elle. Des spasmes qui lui zèbrent la peau, alors que la souffrance transperce sa chaire, abîme son âme, alors que les maux l'entraînent dans des songes brumeuses, irréelles. Elle s'arrache à ses pensées décousues, au son délicieux de sa voix qui l'entraîne dans ses songes, irrésistiblement attirées par l'inconscience, elle a l'âme pervertie par une folie douce. Ses paupière se voilent, un temps, le temps de faire semblant. N'importe qui s'inquiéterait pour toi. C'est humain. Un rire déchire le silence alors que les lèvres de la protectrice se déforme e un sourire bien peu convainquant. Ses orbes réapparaissent, viennent retrouver les opales translucides de ce prince arrachée au sien pour son propre bien. Elle laisse ses doigts pianoter contre ceux du jeune homme alors que les épaules se soulève, dans le vague. Je dois flirter avec l'inhumanité depuis trop longtemps. Une monstruosité dans la déesse est elle même atteinte, irrésistiblement attirée par ses ombres, elle sème le chaos sur son passage et déverse ses ténèbres en un battement de cil. Elle est damnée, la Wolffhart, animée par l’obscurité depuis si longtemps qu'elle l'imprègne tout entière. La noirceur n'est pas réellement un choix, elle s'est imposée à l'ange déchu avec un naturelle presque déconcertant, à croire qu'elle était faite pour cela depuis l'instant où elle avait poussé son premier souffle. Elle se perd encore dans le fil de ses pensées, elle le regarde, lui, mais se perd dans le néant de son existence. Elle ne revient à elle que lorsque la douleur vient lui arraché  un peu d'elle même. Elle se tord, se crispe un peu plus à lui, essayant tant bien que mal de ne pas montrer à quel point elle souffre. Et ses doigts glissent à nouveau contre la joue du prince alors que son poing se referme furieusement pour contenir tous les maux, ses ongles entailles furieusement la chaire pour canaliser la douleur à une seule partie de son corps. Sa carcasse est en proie à des démons maladifs qui la ronge de l'intérieur. Ses yeux se révulse et disparaissent sous ses paupières. Elle sombre à nouveau, a ténébreuse, elle n'est rappelée à la vie que par a voix, lontaine, de l'Osanos. Ses paupières papillonnent, elle essaye de s'accrocher au visage du jeune homme, au tracer de ses traits si familier... Trop familier. Maudit paternel qui laisse son emprunte partout sur sa progéniture, lui creusant le cœur de son absence insupportable. Non je ne veux pas me reposer. On ne sait pas quand cela se terminera. On ne sait pas ce qui arrivera. Alors je ne veux pas terminer mes jours à me taire et me reposer. Elle sourit, encore, vaporeuse présence. Elle secoue le menton, signe à la négative, sauvegardant cette proximité qu'elle ne sait pas dangereuse ni tentatrice. l'amour lui a fait perdre de sa superbe, elle avait oublié ce que c'était, d'être désirable pour un autre que le furieux prince des enfers. Je t'interdis de mourir, Seren, parce que si cette maladie n'a pas de raisons de moi, tes parents rêveraient de me faire la peau. L'un comme l'autre. Il n'y avait même pas d'exception pour son amant, non, il avait dû désirer la voir disparaître pour voir crever l'emprise qu'elle avait sur lui. Cette pensée lui est douloureuse, plus douloureuse que ce qu'elle est en train de vivre, plus douloureuse que tout ce que ce maudit virus peut lui réserver. Elle se dérobe à ses pensées, encore, pour se fixer sur le fils des sept mers. Qu'est-ce que tu proposes? Je crains que notre champ de possibilité ne soit cruellement réduit. Je ne suis même pas certaine de pouvoir quitter les draps.

Nous sommes tous humains, malgré les monstruosités que l'on vit notre capacité et qu'on peut toujours se reconstruire en une version améliorée en plus de ça. Elle l'écoute, l'enfant naïf, le môme idéaliste. Elle peine à croire que ce petit prince est la progéniture du démon qui partage sa couche. Lex et Seren. Le père et le fils. L'ombre et la lumière. Ils se ressemblent et pourtant, semblables, mais on ne peut plus différent, opposés, ils sont des curieux paradoxes. Elle le toise, attentive, laisse son regard s'approprier ses traits, si familier, nullement abîmés par les affres de la vie, comme le visage de son paternelle. Il y a une douceur qui émane de lui, presque risible tant cette caractéristique sied mal aux visage du père Osanos. Elle s'humecte les lèvres, elle le retrouve pour mieux le perdre, Seren. Lex. Leurs visages se mêlent et s’entremêlent. C'est invraisemblable. A force de le regarder de la sorte, elle a la curieuse impression d'être face à un inconnu. Jamais ils n'oseraient. Tu as fais tant pour moi, sans toi à l'heure qu'il est justement ma mort aurait été signé. Elle s'accroche, à sa voix, ses intonations, elle le reconnait, encore, dans la façon dont les mots claquent délicieusement contre sa langue. Elle se perdrait si facilement dans l'illusion, mais il n'est pas un vulgaire garçon dont elle peut jouir pour se défaire de ses frustrations, non, il est l'enfant, le précieux enfant de celui qu'elle essaye furieusement de dégager de ses pensées. Elle ne peut pas, non, définitivement pas. Alors elle ne dit rien, la ténébreuse, s'abandonne à sa contemplation, s'imaginant un autre monde. Elle vascille à nouveau, importé par la fièvre. La sueur perle contre son front, la douleur abîme son visage trop pâle, le regard vitreux, elle transpire la maladie, dégueule la souffrance, mais elle ne dit rien, elle encaisse, en silence, comme elle l'a toujours fait. Lorsque la mélancolie ou la douleur s'installe, la musique est la seule qui peut résoudre les maux. J'ai appris une chanson très ancienne, parlant de la création du monde et d'Aksana. Je ne me souviens plus des paroles, mais je me rappelle de l'air. Je peux toujours le chanter. Elle ferme les yeux, la déesse des eaux. Elle se laisse emporté par la mélodie divine qui s’extirpe des lèvres du prince des océans. Elle s'abandonne, pelotonnée contre lui, à la recherche d'un peu de chaleur alors que le froid lui arrache un frisson, remontant détestablement son échine. Elle se crispe, contre lui, seule présence humaine. Elle se laisse envoûter, elle se laisse enivrer, par une voix, délicieuse voix, une voix suspendue dans un temps qui s'arrête et s'immobilise. Elle se laisse bercé, elle n'est plus elle même, l'ombre, dévorée par une maladie, elle n'a plus la moindre emprise. Elle savoure cet instant qu'il lui offre, cet instant, presque irréel, presque trop doux pour l'horreur de ce monde. Merci. Qu'elle murmure lorsque sa voix s’éteint et que le silence reprend ses droits. A demi consciente, elle est presque ailleurs, lovée contre ce garçon là. Elle n'est pas de ce genre là, pourtant, elle ne s'abandonne pas à des étreintes doucereuse, pas avec un homme, non jamais. Il n'y a rien de doux, rien de beau, rien de tendre en elle. Le sait-il, le gamin, qu'elle n'est pas réellement elle-même? Que c'est la maladie qui parle?