Il le regarde s’étirer sur la pointe des pieds, un sourire fleure alors sur ses lèvres mutines. Le vert sapin orne la grande salle de toute sa majesté hivernale, et les silhouettes s’affairent autour de l’arbre pour y déposer guirlandes et boules de milles couleurs. Parmi elles se détachent le corps noble du prince sacerdo, dont les muscles fins se laissent deviner sous sa tenue dévote. Tobias est posé à l’autre bout de la pièce, en retrait des servants et amis des Griffith, ne prenant part à ces festivités que comme le témoin silencieux qu’il a toujours été. Son regard sombre ne peut se détacher de son double, de celui auquel il est lié jusqu’à leur mort commune, ce frère qui ne partage pas la moindre goutte de sang avec lui. Eros, le grand et élégant prince aux mains constamment jointes dans une prière. Eros, dont le regard flegmatique perturbe les nuits de l’oranger. Ça l’amuse, Tobias, de voir l’autre galérer avec cette fichue étoile d’argent, celle-là même qui orne le grand sapin chaque année dans la grande salle commune du palais de Greenstall. Les mains au fond des poches de son pantalon, et un sourire railleur sur les lèvres, Tobias traverse la pièce et s’approche des fervents décorateurs. L’une de ses mains sort de son repère, et se pose subtilement dans le dos du maladroit. Ses doigts sentent les muscles dorsaux rouler sous le fin tissu de sa tenue et la chaleur réconfortante qui s'en dégage. Son regard mutin se teinte d’une lueur lubrique et le mêlé se penche par-dessus l’épaule d’Eros. « Laisse-moi t’aider. » susurre-t-il au coin de son oreille. Ses doigts se meuvent et glissent le long de son bras, jusqu’à sa main puissante et en saisit l’étoile argentée, non sans laisser une caresse frémissante au creux de sa paume. Tobias s’étire à son tour, grimpe sur la pointe des pieds, et ses bras s’envolent haut, haut. De ses doigts fins, il dépose la décoration sacrée sur la plus haute branche du sapin, et tous dans son dos applaudissent la touche finale. Tobias se tourne vers Eros, le regard pétillant et le sourire fleuri, et se penche vers lui, plongeant ses iris sombres dans celles toutes aussi ténébreuses de sa moitié. « Ça compte, parfois, la taille. » Et si toutes ces paires d’yeux n’étaient pas rivées sur eux, Tobias lui montrerait sans plus attendre le fond de sa pensée.