Elle a le cœur qui bat, le cœur qui explose et l’adrénaline qui vient bousiller ses sens. Isaure elle court et elle canalise toute cette énergie. Pour quoi exactement ? Elle-même n’est pas vraiment sûre, elle n’est pas sûre d’avoir pris la bonne décision. Sa mort, voilà vers quoi elle se dirige. Et pourtant ça ne l’arrête pas, et pourtant elle continue, elle continue cette course folle vers ce qui semble être sa pénitence. Il est là, ce fiancé dont elle n’a pas voulu, mais à qui ce soir elle sauvera la vie. Pour quoi ? Elle n’en a pas la moindre idée ; peut-être pour contrarier son idiot de frère, ou peut-être tout simplement parce que derrière ces regards arrogants et cette mine farouche, elle avait réussi à s’attacher à lui. Et voir sa valeur. Elle sent la présence de Svea à ses côtés, calmant les battements de son cœur, rendant la nervosité tolérable. Si elles se font attraper ici, le jeu est terminé, la défaite est imminente. Alors elle se force à respirer, à inspirer, expirer, serrer les poings et foncer, foncer vers le point de non-retour. Elle entend le grognement de quelques gardes, le visage de l’aîné Griffith dépassant par l’entrebâillement des couloirs. Eros se charge de la supervision des cachots, alors que les deux jeunes filles grimpent les escaliers avec hâte. Elle entend des pas et voit arriver deux gardes en leur direction. Elle fait signe à Svea ; « Je me charge de celui de de gauche. » Et elle court dans sa direction, un coup de pied bien placé, une petite boule de feu se formant dans la paume de sa main, juste assez pour éteindre le vif du garde et passer à travers ses filets. Se rapprochant de l’échéance, elle s’entend respirer, elle s’entend grogner. Puis, lui apparaît le visage de son fiancé. « Que me vaut le plaisir de ta visite ? » Elle lève les yeux au ciel ; pourquoi serait-elle là, devant sa cellule, la veille de son exécution ? « Dans la logique des choses, pour te délivrer. » Qu’elle chuchote alors qu’elle s’accroupit au pied de la serrure. Accompagnée d’outils, elle n’avait pas fait ça depuis longtemps. Son cœur bat, elle n’a pas le temps d’hésiter ou de faire une erreur. « Les gardes ? » Elle regarde dans son dos, voyant la silhouette de sa sœur. « On s’en est chargé. Mon frère est un abruti un peu trop fier, il n'a pas mis assez de gardes pour nous arrêter. Ton frère nous attend à la sortie de la capitale. » Qu’elle chuchote alors qu’elle s’affaire sur cette satané serrure.

Un dernière nuit. Quelques heures. La mort plane, l'ombre sournoise lui colle délicieusement à la peau, à chaque pas qu'elle fait, elle est là, elle sait pertinemment que l'âme de la belle sera bientôt sienne. La captive n'arrive pas à s'apaiser, bouleversée, elle a foulé de le sol de cette cellule tant de fois qu'elle se demande pourquoi ses pas n'ont pas creuser des sillons dans la pierre. Elle s'épuise, incapable de s'abandonner à la nuit... Elle ne veut pas perdre les dernières heures de son existence à courir après des songes. Les bruits de pas résonnent dans les cachots. S'il est plutôt habituel d'entendre allées et venues des visiteurs en pleine journée, elles l'étaient nettement moins lorsque le soleil disparaissait derrière la ligne d'horizon. Tu t'approchais des barreaux, sans pour autant te laisser voir des deux femmes qui s'arrêtaient devant la cellule de ton prince. Tes sourcils se fronçaient alors qu'elle les toisaient l'une et l'autre. Si l'une des silhouette t'étaient inconnues, la deuxième était reconnaissable entre mille. Isaure Oshun. La princesse héritière en personne. Tu demeurais silencieuse alors que tu les écoutais, l'un et l'autre, sans réellement comprendre les enjeux qui poussaient la princesse des flammes à trahir les siens au profit d'un fils de la terre, proclamée ennemi de l'empire par les actes inconsidérées de Thomas. Elle était méfiante, Aléa, mais elle n'avait plus rien à perdre, sa vie était déjà mise aux enchères. Elle s'approche, la brune, glissant ses doigts sur les barreaux de sa prison.

Les derniers jours furent éprouvants pour la gamine. Le poids logé au creux de son estomac s'était envolé depuis que l'impératrice avait expiré son dernier souffle. Pour autant, les cicatrices des années perdues ne s'étaient pas effacées. La mêlée avait eu le temps de réfléchir à la suite, maintenant que l'unique but de son existence était atteint. Svea le sait, elle est recherchée pour trahison, la peine capitale est suspendue au dessus de sa tête telle l'épée de Damoclès. Mais, bientôt, elle n'aurait plus à se cacher. La fuite tant rêvée des deux sœurs pourrait enfin commencer. Mais il leur fallait libérer le prince de la terre, avant toute chose. Suivant Isaure telle son ombre, la gamine hoche de la tête alors, qu'une fois de plus, les sœurs vengeresses se répartissent les vies à prendre. D'un geste précis, la poupée enfonça sa dague dans l'estomac du garde, à de nombreuses reprises, faisant couler le carmin de l'ennemi sur les pavés. La cellule du condamné n'est plus qu'à quelques mètres alors que Svea laisse la blonde s'occuper de la déverrouiller. Son regard azur se pose sur Adonis alors que celui-ci fixe du regard la serrure céder. Son estomac se serre et l'état du prince fait dangereusement écho à toutes ces années de souffrance. Elle ne peut que compatir à son état et elle le sait, quelque chose en lui s'est brisé. Elle n'a pas besoin de le connaître pour le savoir, elle peut le sentir. – Il ne faut pas traîner. Cal est peut être idiot mais ceux qui l'entourent ne le sont pas. La gamine suffoquait déjà, dans ce lieu qu'elle n'aurait jamais voulu retrouver. Tout ici lui rappelle sa geôle et c'est sur le point de la paralyser. – Heureuse de vous revoir parmi nous. Mais son regard se pose bien rapidement sur la cellule à côté et sur l'adiutor qu'il fallait également libérer. Son rythme cardiaque s'affole devant le temps que tout cela prend. Svea compte bien quitter le palais et ne pas y revenir tant qu'Isaure ne portera pas le titre d'impératrice.