Tranchante, si pure, si sûre. Femme de l’ombre, qui acquiesce et confesse, sort les armes, joue de ses charmes, pour gagner les cœurs et les débats. Laurel, grande fidèle, survole le monde comme si rien ne pouvait la bouleverser. La lionne, en public, droite sur ses deux pattes, jamais ne vacille, jamais n’hésite ; et jamais ne se trompe. Les décisions de son roi sont ses opinions, la paix, oui, mais la monarchie, réglementée, organisée, assurée dans le temps ; les mutants de côté, pour l’instant. Elle est tout pour ça, Laurel, tout pour la paix, et pour qu’elle perdure. Mais la guerre n’a de cesse et la haine se répand, fait couler le feu, période de canicule : ils sont trop nombreux, et personne ne capitule. L’empire n’est plus, elle l’a voulu, a encouragé la décision, et la soutient encore aujourd’hui : qu’ils essayent, tous, s’ils le souhaitent. Qu’ils essayent et qu’ils comprennent, qu’ils voient par eux-mêmes.
Dans la sécurité de son foyer, la sauvage faiblit, parfois : ils se battent pour quoi ? Elle est si sûre de faire les bons choix, d’être du bon côté, sa loyauté ne se perd pas, ne se perdra jamais, mais son esprit se tord, et son cœur s’alourdit. Comment savoir s’ils ont raison ? Et pourquoi leurs efforts payent-ils si peu ? Elle savait, au moment de la rupture, que ce serait difficile, Laurel. La belle n’est pas naïve, mais elle espère, si fort parfois, que le palpitant explose et la colère gronde. Princesse du feu, elle ne craint rien d’autre que de voir ces espoirs déçus. Cal, radical, de rares fois, où elle se rappelle s’être dit que c’était trop, que c’était mal. Les mutants, les mêlés, les humains, tous produit de la même roche, des mêmes étoiles, mais ça elle le tait, elle se contente de se le dire tout bas, ”ça ira mieux quand la paix sera là”.

pseudo et prénom ‹ kulkid sur bazz et cess dans la vraie vie (ouais, une autre  ) âge ‹ vingt-trois ans  comment as-tu trouvé le forum? ‹ faut répondre "très beau" ou "sur une carte" ?    pays ‹ entre la france et l'angleterre mais donc ça va, le fuseau horaire est pas trop chamboulé    fréquence de connexion ‹ un peu tous les jours votre avis sur le forum ‹ ah c'est là qu'il faut dire qu'il est beau   gros coup de coeur sur toute la ligne, graphisme, contexte, intrigue, activité, plumes et beaugossitude des avatars   . parrain ? ‹ mes p'tits pieds m'ont conduit tous seuls jusqu'ici smiley préféré‹    gif qui décrit le mieux votre personnage‹

Spoiler:

C’est l’histoire vue et revue d’un monde qui s’effondre sans qu’on puisse rien y faire. À gauche, il y a ceux qui regardent. À droite, ceux qui participent. Devant, ceux qui s’enfuient et derrière, ceux qui jubilent. C’est l’histoire déjà racontée cent fois des alliances et des belligérants, des conquérants, des concurrents, du bien et du mal, des loyautés trahies, de l’argent et du pouvoir, de la gloire, de la guerre, toujours et de la paix, jamais. C’est l’histoire circulaire, comme une boucle parfaite, qui se répète, qui se répand et qui se perd. À gauche il y a la justice, à droite les armes, devant l’avenir et derrière ceux qui l’en empêchent. Et au centre, il y a elle ; celle qui ne bouge pas, respire à peine, subit sa peine et puis l’oublie. C’est l’histoire qu’on ne raconte plus, qu’elle ne racontera pas, parce qu’elle n’en verra pas la fin. Elle inspire toujours avec maîtrise, expire avec parcimonie, comme si son souffle retenait l’accalmie. Laurel, mesurée, assurée, les yeux qui lui courent sur l’apparat, les visages figés, qui attendent qu’elle prenne la parole. Laurel l’oratrice, celle-là même qui a toujours les mots aujourd’hui les a perdus. Son regard est brillant et seul son souffle contrôlé s’échappe d’entre ses lèvres. Et Laurel, pour la première fois, n’a pas les mots. Elle parvient à taire les battements de son cœur, sans doute un peu trop forts, à contrôler les mouvements de sa poitrine, avant qu’elle n’explose. Muette, interdite, elle maintient le regard pour rester debout ; pour ne pas se dérober. Et les mots sont au bord mais ils ne sortent pas. Ils bataillent pour être les premiers, pourtant, pour être les meilleurs, les plus justes, mais ils ne sortent pas, et le temps semble s’étirer dans le silence que personne ne brise ; parce que tout le monde est dans son cas. Mais c’est à elle de parler. C’est à elle de répondre. Et son souffle reste plat. Et ses mots partent en fumée.

Elle retrace en pensée les évènements de ces six derniers mois, de ses choix et de leurs conséquences. Mille fois les a-t-elle remis en question, mais c’est la première fois qu’elle les regrette ; et ce n’est pas Cal qu’elle tient pour responsable, ni Pollux et son armée, ni les mutants, ni le nombre de souverains et leur avarice, leur avidité ; aucun de tous ceux-là ni aucun de tous les autres : c’est bien sur ses épaules qu’elle pose l’erreur, la laisse peser, endosse le fardeau. Si elle avait, au moins essayé, de convaincre son roi de le rester encore un peu, le temps de se débarrasser des problèmes autrement, de trouver une autre solution- et elle lève les yeux au ciel, parce qu’ils sont déjà passés par là des centaines de fois. Il n’y avait pas de meilleure alternative. Pourquoi rien n’avait jamais semblé moins sûr ? Elle n’avait pas perdu les mots pourtant, quand il s’était agit de se tenir auprès de Cal après la dissolution de leur empire. Elle n’avait pas perdu les mots, Laurel, lorsqu’elle avait vu Launondie partir en fumée. Elle n’avait pas perdu les mots devant les corps et la violence. Elle n’avait pas perdu les mots quand elle avait dû ouvrir son foyer aux délogés de la capitale. Elle n’avait pas perdu les mots quand il ne restait plus qu’eux pour rassurer les désespérés et ranimer les espoirs. Elle n’avait pas perdu les mots à son mariage, et devant sa belle-famille, malgré l’angoisse évidente qui lui tordait l’estomac alors. Ni les jours d’après, ni les semaines qui suivirent, alors que sa présence était exigée partout à la fois, qu’on la réclamait pour ses conseils avisés et son agréable compagnie, que ses ennemis se rapprochaient et ses amis se déchiraient.


Elle les retrouve dansants dans ses souvenirs, la tête blonde de Cal, les yeux perçants de Gunnar, les contours de sa mère qu’elle dessine dans ses songes, la silhouette de son père, qui lui manque sans jamais qu’elle l’admette. Tout le chemin parcouru. Firekiro, Flamaerin, le bronze puis l’argent, l’ascension d’une gamine sauvage comme les flammes d’un feu de bois, et celles d’une ville qui périt, aussi. Elle se rappelle les batailles, des nuits à attendre, des stratégies montées et démontées, de celles qui ont payées, et de celles qui les ont perdus. Elle se souvient des sourires innocents, avant tout. De l’académie, à l’époque où sa plus belle victoire c’était de le croiser dans les croiser dans les couloirs, où l’excitation résonnait dans sa poitrine plus que l’inquiétude, plus que la peur et plus que le désespoir.
C’était si simple et si fragile.
Elle se remémore, surtout, comment elle en est arrivée là.
Grâce à qui.
Ou peut-être à cause.

Alors son regard se ravive et son menton se relève. Cal est un imbécile, parfois, et ce qu’il décide, il le décide souvent mal. Mais le monde part en fumée et elle croit encore qu’il est leur meilleur espoir. Le virus les a affaiblis, puis renforcés de manière déconcertante. Et s’ils n’ont rien vu venir, elle sait aujourd’hui qu’ils sont plus de jamais forgés dans la même roche, liens scellés par le brasier ardent d’un même désir, d’une seule volonté : assurer une paix pérenne, indélébile. Elle a failli partir tant de fois, c’était toujours lui qui la faisait rester. Lui et ses caprices, lui et ses mauvaises idées, lui et ses folies, souvent. Et elle, elle a gardé ses secret, assis sa loyauté comme la seule vérité de l’univers, elle a prêté serment, promis de se tenir à ses côtés, envers et contre tous, malgré et en dépit du reste. Aujourd’hui, comme les jours qui l’ont précédés, comme ceux qui suivront, Laurel s’en va en guerre. Parce qu’elle ne peut plus reculer. Parce qu’il est trop tard pour l’abandonner. Parce qu’elle le raisonnera plus tard, avec diplomatie, et patience, comme elle sait si bien faire, et que pour ça, il faut rester. Parce qu’elle est chez elle, les Gimsrud et Swanson peuvent bien garder leur fief, à cet instant précis, Laurel est Oshun, Laurel a promis. Et quand ses yeux se replantent, comme aimantés, dans les iris de son souverain, c’est presque comme si les mots avaient toujours été là. « Il y a longtemps, je t’ai promis de rester à tes côtés quoi qu’il arrive. À cette époque, tu levais les yeux au ciel dès que je parlais et tu aurais souvent préféré que je te laisse respirer. Pourtant tu as hoché la tête et promis en retour. Il y a quelques années tu m’as demandé de rejoindre ton conseil, et je t’ai juré fidélité sur tous les dieux que l’on vénère. Il y a trois mois, nous avons perdu Ernest et tu m’as demandé de prendre sa place à tes côtés. Je crois que ta confiance en moi n’est pas à remettre en doute, si ma loyauté, après tant d’années. Tant d’années pendant lesquelles j’ai souvent voulu t’étriper, tant il était difficile de te voir appliquer nos conseils. Tant d’années durant lesquelles je t’ai presque quitté mille fois, toi et notre patrie à laquelle je suis pourtant tellement attachée. Tu m’as rendu folle. De peur, de rage. De joie, parfois. Tu n’en as toujours fait qu’à ta tête. C’est pour ça que tu es notre Roi. Sans doute aussi pour ça que l’on fait encore partie des vivants. Aujourd’hui je ne suis plus sûre de la direction à prendre. Mais quelle qu’elle soit, je l’emprunterai avec toi. Aujourd’hui, comme il y a si longtemps, comme si y a quelques années, comme il y a trois mois, je renouvelle ma promesse. Oui, je te suivrai. Aujourd’hui. Demain. Toujours.   »