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the crimson blaze.

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MessageSujet: the crimson blaze. the crimson blaze.  EmptyVen 27 Avr 2018 - 1:16

07/05/2165


TROIS HEURES AVANT.

— Ivo refusera.
— Force-lui la main.
Sa présence est-elle vra...
— Il suffit, Asrae. Par ses grincements de dents, son ton graveleux, et ses syllabes impeccablement articulées, Sabah ne laissait aucune place à la riposte, moins encore à la plainte, dont Asrae n'était de toute façon pas adepte. Malgré qu'elles n'aient jamais évoqué le sujet, il y avait des comportements, notamment de la part de la fille, qu'une mère comme Sabah ne pouvait ignorer indéfiniment. Mais le moment n'était pas approprié, et un colloque au sommet attendait Asrae.
— Très bien.

UNE HEURE AVANT.
Où ce diable de Senri pouvait-il se trouver ? Le filou s'était glissé dans la foule voilà une heure, en quête d'un pauvre hère à détrousser, et elle soupçonna l'arrogance inhérente à son jeune âge de l'avoir mit à la poursuite d'un larcin trop ambitieux. Ce sale gosse trimballait le Bô de son mécène, au cas où, et à tous les coups, s'en était allé se boyauter avec les cagaudes de la taverne voisine. Juchée sur les toits, Asrae observait l'entrée du Crow Club, où tout se déroulerait ce soir. Il y avait cette odeur de salpêtre, de bourbe vinaigrée et de merde qui flottait dans l'air, et à laquelle elle était à présent accoutumée. Jhiu N'guri, l'égout des dieux Oshun. Quartier édifié sur un tas d'immondices par ces divinités bâtardes qu'on a supposé désireuses de punir les dévots pour leurs offrandes insuffisantes, et où la pègre en question, dont elle faisait partie, se révélait grâce au règne avant-gardiste de son nouveau souverain. L'un de ses principaux malfaiteur venait de pousser la porte du club, sonnant ainsi l'heure de sa rencontre avec l'idole, ou à défaut, son cousin. Avec une précision millimétrée, Senri fit une apparition timide derrière les pierres.
— Va dire à Maitre Oshun que notre ami est arrivé.
— Milord de Milady ? Drôle. Certes, il y avait trop de Oshun pour espérer soustraire Senri à la confusion, mais cela n'excusait en rien ces sobriquets idiots. Asrae lui jeta un regard noir. Il savait très bien lequel, de Oshun.
— Vite. Sa langue a claqué dans sa bouche, le sommant de s'en aller avant qu'elle ne décide de le corriger. Elle voyait en Senri l'enfant qu'elle aurait pu être, et c'est là la seule raison qui l'empêchait, parfois, de sévir. Après une révérence grotesque, il s'en alla s'enquérir du prince aux nombreux rôles. Cousin. Fils du père. Administrateur. Combattant. Fiancé.

20 MINUTES AVANT.
Officiellement, Ivo Muirgen donnait dans le commerce de la pierre. En bloc, en gravier, carreau, pavé, caillasse, et autres. Officieusement, il refourguait aux plus offrants quantité de pierres précieuses dérobées dans les carrières, et les mines. En échange des plus belles pièces, la famille Khodja lui autorisait l'accès à l'étage très select, mais pas distingué pour autant, du Crow Club. Si l'arrangement tenait sur un équilibre précaire depuis le mariage de Cal et Alaia, ainsi que l'élévation des Khodja, il ne tenait désormais plus la route maintenant que le fiancé de la seconde occupait un rôle prépondérant dans les mines où Ivo se procurait toute sa marchandise, précieuse ou non, ce hors des sentiers creusés par les codes du palais. Même s'il s'avérait que les mères s'entendaient avec Ivo, leur sens des priorités s'en était retrouvé bouleversé par cette violente rafale qu'on appelle le mariage. — Il s'est vanté d'avoir dépouillé la mine ouest hier. Impassible, elle darda un regard sur Ivo qui jouait plus loin. —  Je te laisse pourparler avec lui. Léo représentait l'affaire, la besogne, les mines Asrae retrouvait son rôle de menaçante, d'ombre, de corbeau, d'organe visible des Khodja. Le but étant de forcer un arrangement dans la gorge d'Ivo plutôt que d'opter pour la solution moins propre, moins élégante, mais plus sure : l'assassinat. Ivo était connu et apprécié dans les bas-fonds pour son business. Assez pour susciter un vent d'indignation parmi ses collaborateurs s'il lui arrivait malheur. Un semblant de révolte, une étincelle, qu'ils, elle et Léo, ne pouvaient se permettre. Accosté sans ménagement, Ivo Muirgen tenta de se tenir droit, et de hisser ses allures les plus nobles pour ce couple à la physionomie renversante. Couple qui, au demeurant, n'en était pas tout à fait un, mais dégageait un charisme effronté parfaitement saisissant face à ce mortel dont la panse était aussi large que son âme demeurait malingre. Léonte pouvait aisément le toiser du haut d'une tête-et-demi supplémentaire ; rendant vain, et particulièrement risible, l'effort du truand d'écraser les fiancés sous une espèce d'autorité déficiente. Il jouait ses dernières pièces de la soirée aux cartes, la récréation des benêts selon Asrae qui soupçonnait Ivo de compter, ajoutant à sa situation une énième raison de converser.  Si le ton tout à fait diplomate de cette entrevue ne fonctionnait pas, la dague savamment niché dans le creux entre ses vêtements et ses reins achèverait de soumettre Ivo à une toute autre forme de coopération, et elle connaissait bien des manières de convaincre.

Elle se tiendrait à l'écart de la conversation, occupée à étouffer les convictions malhonnêtes d'Ivo de ce regard hérité de Sabah,  une main sur la hanche et l'autre sur le dossier du siège où Léonte serait assis en gage d'un soutien adroitement simulé.
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MessageSujet: Re: the crimson blaze. the crimson blaze.  EmptyVen 27 Avr 2018 - 17:07

Rien ne ressemble moins au fils d’Hector Oshun que le Crow Club. On y vide les godets et y évide les bourses comme s’il n’était pas de plus grand bonheur terrestre que d’être dépouillé par un voisin à la gueule de travers et à l’haleine fétide, qui le sera à son tour par plus fruste et plus ivre que lui ; quand ce n’est pas la Maison qui gagne. La dégaine ascétique de Léonte détonne dans cette quincaillerie d’hommes de peu, de gens de rien, de putains, de raclures et de braves, de telle sorte qu’il en est le premier informé et le plus dérangé. L’on dirait qu’ils portent quelque peste, dans le corps, dans les mots, et qu’ils postillonnent dans son sens à dessein de le dégrader. Son mépris le retient de se rendre à eux et de rentrer chez lui – ou plutôt dans le giron des siens. C’est la part de sa collaboration avec Asrae. Quand cette affaire aurait pu se régler au Palais des Flammes, à grand-renfort de gardes, de chaînes aux chevilles et aux poignets, il a été convenu, moins tacitement qu’instinctivement, que c’était lui qui descendrait par les ruelles. Remuer la fange ne lui fait aucune peur, contrairement à frayer sous un toit scellé par le nom des Khodja. Ils, ou plutôt elles, auront sa peau, elles auront pire son âme, et il ne restera plus rien du fils prodigue qu’on a donné aux chiennes. Bien qu’il soit instruit du sort qui le persécute et qui accourt, Léonte résiste mal. Ses impressions, fussent-elles fondées, ne le font pas moins fiancé et, depuis qu’il a été rappelé à Launondie par son père sous prétexte de guerre, le soudard a l’humeur quelque peu éclaircie et la conscience plus malléable. Ses détestations ruminent et lui accordent de la tranquillité, assez pour rappliquer dès la bouille malicieuse d’un Senri qu’il aperçoit plus souvent qu’il ne le voit. Léonte apprécie le garçon autant qu’un prince peut aimer un vaurien mais cela fait au moins une chose qu’il trouve plaisante chez Asrae.

Par-dessus l’épaule d’Asrae, Ivo Muirgen fait basse impression à Léonte. Les deux bien assortis contre leur mauvais gré regardent, ensemble, dans la direction du bonhomme, aussi attentif que de grands prédateurs après une proie minuscule. « Je suis tenté de l’ouvrir de l’ombilic à la trachée pour lui apprendre le sens des pourparlers. » À fort mal le connaître, on voudrait imaginer un air carnassier ou un quelque sourire mauvais sur cette figure qui, au contraire, demeure inerte. Après qu’il l’a gratifié d’une lorgnade appuyée, Léonte dépasse la brune et se rend auprès de son voleur. À mesure que les toises de distance disparaissent, Ivo paraît plus ridicule, très ordinaire et assez loin de l’image que l’on se fait d’un pilleur de gemmes. « Vous savez qui je suis ? » Machinalement, le bougre défroisse le bas de sa tunique avant d’opiner de la tête. Ce mutisme à peu près obséquieux n’est guère suffisant vu le silence immobile qu’en retour il obtient. « Vous êtes Léonte Oshun, dit-il alors. » « Asseyez-vous. » Encore qu’il répugne à se compromettre de la peau à la peau, Léonte appuie de sa paume sur l’épaule d’Ivo Muirgen jusqu’à ce que son fessier ait retrouvé le siège. Il est rapidement imité, cependant qu’Asrae Khodja fait une escorte un iota plus impressionnante de son côté de la table. Les rares compagnons de jeu d’Ivo qui, de part et d’autre, n’avaient pas encore déserté sont aussitôt chassés par cette seule ombre (Asrae serait moins facile à haïr si elle ne constituait un atout aussi efficace). « Vous avez une idée de votre chance ? » Le fils d’Hector Oshun a une telle façon de s’exprimer que c’est à peine si ses lippes se meuvent et si son timbre détache une syllabe de la suivante. Il parle bas et distinctement malgré le grabuge de la maison de chance ; aucune chance qu’Ivo ne l’ait pas entendu ou, à tout le moins, décrypté. Pourtant, il flaire la rhétorique et tient bon qu’on lui livre plus franchement sa pensée : « Il est l’heure de vos aveux passés d’un jour entier et vous avez encore vos entrailles à l’intérieur. C’est assez prodigieux quand on pense à ceux que vous avez choisi de voler. »
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MessageSujet: Re: the crimson blaze. the crimson blaze.  EmptySam 5 Mai 2018 - 1:00

La suggestion eut le mérite de la mettre d'accord avec le lion. Sur le fond, au moins. Asrae avait en tête quelques supplices plus élégants, mais pas moins fourbes que ce qu'il proposait ; et elle ne douta à aucun instant que l'inspiration, en accord avec ce sens de la mise en scène qu'elle avait de grandiose, saurait l'animer au moment opportun. Et il y en aurait un. Ivo était bien des choses, si ce n'est un orateur persuasif, ou tout du moins décent. Il négociait ses affaires comme un chien en dalle se ruait sur une viande empoisonnée : la cervelle nue de toute considération. Le bougre lorgnait sur eux comme le malotru sur deux misérables loufiats, encore qu'il fallait le remercier d'avoir l'obligeance de trembler d'un émoi légitime face à cette association du diable, et de prononcer le nom de Léonte Oshun avec une précaution lustrée. Dans ce qui se voulait conciliabule coincé entre une pléthore de causeries excitées par l'attrait du jeu, Asrae chaussa diligemment son rôle de félin en retrait, prête qu'elle était à bondir sur la prise du jour au moindre regard de biais. Elle admira à contrecoeur la façon dont Léonte se tenait, et abordait le pillard. L'on s'attendait à un prince maniéré, bégueule, somme toute protocolaire. Un précieux joyaux de la couronne, à qui on épargnait les guerres puisqu'elles étaient le fardeau de l'autre branche, et dans cet acte dont le théâtre des gredins se débectait : un faon propre sur lui-même, cerné par des braconniers. Pourtant, il n'en était rien, mais qu'attendre de plus de la progéniture-reflet d'Hector Oshun. Sans parvenir à se dépêtrer de cette aversion croissante et un rien pathétique qu'elle nourrissait pour Léo, qui en avait pour la première fois toutes les allures, Asra réalisa que, comme elle, il était l'image de quelqu'un d'autre ; arrosant en elle un germe de curiosité qu'elle étudierait plus tard, ou jamais. Plutôt que confesser, Ivo préféra éclater d'un rire éraillé, arrachant un regard sinistre à une Asrae jusque là imperturbable. — Ecoute, gamin, j'vais pas m'battre. Si le contexte n'avait pas été si formel, et si elle en avait été capable, elle aurait ri. Au nom du terme gamin trop audacieux, même pour elle. Ivo voyait en eux deux mômes qui marchaient dans les godillots trop grands de leurs parents respectifs, et il n'y avait, aux yeux de la fille de Sabah, pas plus grande offense, cela même si elle admirait sa mère comme un fidèle, son idole.  — Ici, c'est pas l'palais impérial. Y avait un business avant vos histoires de collabo', et j'vois pas pourquoi on irait changer les habitudes, tant qu'elles sont bonnes. Une goutte de sueur, témoin d'une gêne sensée et visiblement douloureuse, suinta le long de sa tempe.  Quoi qu'enclin aux fantasmes, Ivo ne pouvait désormais plus nourrir aucune illusion quant à l'issue de cet intermède, mais au moins avait-il la correction d'assumer ses larcins, et sa position face aux Khodja qu'elle représentait, ainsi qu'à leurs nouveaux alliés. — Un deal est un deal, Ses pupilles glissèrent du lion au corbeau. — Un cadavre est un cadavre, fredonna-t-elle. Asrae mettait toujours un rythme, ainsi qu'une poésie certaine dans ses menaces, furent-elles amarrées dans un jargon vulgaire que l'on ne déniche que chez la canaille, ou spolié à la noblesse. Chaque mot était détaché, affuté comme une lame de rasoir, et espacé de l'autre par un tempo détonant, sans que le ton ne s'extirpe jamais d'un registre serein. Elle parlait peu, ce pourquoi chaque syllabe était à considérer avec prudence et privilège. Une riposte funeste qui fit maronner Ivo. Ivo qui peinait se soustraire à une panique croissante, et dont la main maladroite confectionna une flamme bleue furtive. Mutant. Si elle refusait que quelconque mal soit prodigué à ceux que l'on considérait aujourd'hui comme la lie des maitres, au nom de sa cadette qui en était malgré elle - et seulement à ce motif, il était honnête de la part d'Asrae de soutenir qu'il y avait un piédestal pour tout bénis, et que son don lui était prétexte (un énième) pour regarder ses pairs de haut. Ivo, d'une falaise. — Considère cette nuit de jeu comme le terme de ton pacte avec les Khodja, et le préambule d'un nouveau avec les Oshun, Un qui incluait une mise à la retraite anticipée, une mise aux fers précipitée, et/ou une mise à mort foudroyante, selon le terrain d'entente sur lequel Ivo daignerait s'avancer, et l'humeur des futurs époux. Un claquement de doigts escorté d'une flamme d'un rouge ponceau, rouille et or, saurait le guider vers la direction à prendre, à condition qu'il ne soit attentif, et un tant soit peu effrayé. — Un dont les termes sont établis par le prince que tu traites de gamin. Le bout de son index s'en alla dessiner les courbes athlétiques de la carrure du prince en question. Le témoin d'une complicité pourtant inexistante, mais délicieusement mimée.

15 minutes avant.
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MessageSujet: Re: the crimson blaze. the crimson blaze.  EmptyLun 7 Mai 2018 - 20:36

Les princes, les pontes et les petites gens sont égaux dans l’impression que leur fait Léonte Oshun ; il n’est guère impressionnant, il suinte la soie aux lisérés filés d’or et la réputation de son père le précède en toute chose, plutôt pour lui nuire que l’inverse. Aux syllabes qui ricochent et l’accablent constamment de son jeune âge, un soupir intérieur se répand dans lui tout en laissant sa figure insensible et ses épaules statiques. « Qui parle de se battre ? glisse-t-il sans l’ombre d’une menace intercalée dans le timbre. » À défaut de meilleurs termes, il exécutera froidement le gredin. Ou il abandonnera à Asrae le soin de se commettre afin qu’elle croit encore un peu qu’il en est incapable. Traiter avec cette canaille n’a qu’un but, d’ailleurs plutôt en marge des préoccupations de Léonte : tempérer les remugles que sa cessation d’activité provoquerait. Lui sectionner la carotide ou entrer dans sa fémorale n’aurait pas seulement pour conséquence d’éveiller un sursaut de crasse loyauté parmi ses condisciples, le crime créerait du vide, de l’espace pour quelque voleur que le sort funeste de son prédécesseur n’aura pas dissuader. Et ainsi de suite, sachant que la ville-basse compte plus de manants et d’opportunistes que Léonte, ou même Asrae, ne peut se permettre d’en décapiter. Non, il vaut mieux marchander tout en faisant entendre à l’autre partie qu’on est prêt aux recours de fond de tiroir et de fourreau huilé. Cela, c’est plutôt le domaine des Khodja et, alors même que le fils d’Hector Oshun ne moufte à rien (car le sens de la déduction d’Ivo est manifeste : non, ils ne se trouvent pas au palais impérial, ils ne pourraient en être plus éloignés par les mœurs et par le décor), Asrae n’est pas pour décevoir son nom et la réputation des siens. Le Muirgen est, de toute évidence, plus sensible aux sommations voilées qu’il doit reconnaître de son propre patois. Les mâchoires de Léonte crissent l’une contre l’autre ; d’un point de vue extérieur, nul doute qu’ils paraissent unis, la complicité même, pendant qu’il n’en est rien et qu’ils le savent fort bien. Quelle importance ? Aucune, si ce n’est pour lui. Et le corbeau de sale augure l’engonce dans davantage de répugnance tandis qu’elle le frôle à l’index. Il avale la bile que, de toute manière, un moindre contact lui provoque ; peut-être est-ce pire, car cela présage de plusieurs devoirs qu’il devra accomplir. Ses pupilles, qui suppliaient de tomber sur la main, se maintiennent bon gré mal gré dans le regard de moins en moins tranquille d’Ivo Muirgen. « Non, il a raison, intervient Léonte avant que le voleur, ayant rassemblé sa témérité, ne le fasse. » L’affirmation surprend Ivo, dont la figure se fend de perplexité autant que de suspicion. Ses traits disent quelque chose de l’ordre de  : ah oui, j’ai raison ? et tu pourrais me dire à propos de quel morceau, p’tit ? Le jeune administrateur saisit le flottement au vol, ce même ton laconique dans la voix : « Un accord est un accord. » La reformulation est une sorte d’injure en soi. Néanmoins, personne n’a l’occasion de le soulever. « Dans certains marchés, c’est une loi coutumière de dédommager celui qu’on lèse en abandonnant un contrat en cours. On astreint des pénalités pour chaque bénéfice qui n’aura pas l’opportunité de se réaliser. » Bien que les mots employés soient à la fois empathique et, en même temps parfaitement juste, le calcul est rapidement fait par tous les trois : « Cela ferait de vous un homme extrêmement riche. » Une lueur de cupidité s’enchâsse dans les rétines d’Ivo, qui n’est pas non plus jobard au point de mordre à la rançon sans sourciller. Son silence n’est pas sans effet : Léonte, aux commissures, à peine, lui ébauche un sourire. Cette courbure est d’une certaine douceur, immonde sur cette gueule austère. C’en est dérangeant. « Bien sûr, reprend celui dont le rictus se meurt à mesure que les mots s’écoulent d’entre les lèvres, vous faites un métier peu commun. Cela n’est pas sans risque et on peut aisément imaginer qu’un soldat de la garde amoureux de sa solde ou qu’un homme zélé de mon père aurait fini par vous attraper et rendre la Justice sur-le-champ. » Son corps aurait fini sans procès au fond d’un filon épuisé. « Ce serait plus équitable de le prendre en compte au moment de vous payer. » Ce ne sera peut-être pas aujourd’hui, peut-être pas demain, ou dans un an. Mais, un jour, un poignard viendra s’occuper de cette gorge. « À moins que l’on parvienne à un arrangement plus raisonnable, évidemment. » Déjà, Léonte est las, fané de ce jeu sans relief. Ce n’est que pour l’exercice lui-même, pour se maintenir en présence d’Asrae. En une autre compagnie (et à un autre endroit) Léonte aurait ou délégué ou abrégé.


Dernière édition par Léonte Oshun le Lun 18 Juin 2018 - 14:03, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: the crimson blaze. the crimson blaze.  EmptyLun 28 Mai 2018 - 22:50

Le lion parle trop. Pour elle qui manque de l'étrangler à la corde qui garde les rideaux ouverts, et lui fait de l'oeil, lorsqu'elle n'est pas tentée de bailler. Pour Ivo qui s'embarque dans le marchandage de sa vie avec la ferme intention de se dégoter une entourloupe presto, ainsi que pour la postérité, qui retiendra que Léonte Oshun est aussi bavard qu'il n'est coquet. L'on évoque un dédommagement sous une forme pécuniaire, et Ivo se lèche les babines, habitué qu'il est des manières plus brutales des Khodja. L'homme au visage gravé au burin la toise, un rictus disgracieusement mauvais sur la trogne qu'elle rêve de lui ôter à la force d'un tison. Dans la même minute, Senri pointe son museau, lui porte son bô et déjà elle sait. Qu'il montre l'épée sanglée à la ceinture du souverain germain d'un index frémissant ne fait qu'affirmer ce que le code muet de maitre à pupille insinue : danger. Le moutard s'en va aussi furtivement qu'il n'est arrivé, en laissant arme, questions et suspicion accrue à Asrae qui le suit attentivement du regard jusqu'à ce que la foule ne l'avale. — C'est quoi l'problème ? Ivo a remarqué, et l'échange oculaire entre les fiancés n'arrange rien. Le bruit non plus. Un bruit, semblable à une détonation, suscitant le sentiment confus d'une anomalie, d'un élément quelconque ne cadrant pas avec le décor. Tous les sens aux aguets, elle pose une main vigilante sur son bâton, pièce maitresse et signature de son arsenal, et examine le grouillement alentour avec impatience, fouillant pour un coupable, incriminant le moindre figurant de ses yeux sombres. Mais coupable de quoi ? L'incertitude lui fait raffermir son emprise autour de son bô, cela sans le dégainer. Chacun se toise longuement, en chiens de faïence, dans l'attente insoutenable d'un mouvement trop brusque, d'un grondement trop vibrant, ne serait-ce qu'une menace quelconque. Pourtant ça ne se reproduit pas. Pas tout de suite. L'on retourne à ses cartes, ses pions et ses combines, mettant le désordre sur le compte des tonneaux de gnôle tombés dans la cave. Pourtant son intuition lui hurle qu'il y a quelque chose. Un intrus. Un complot. Un danger. Elle quitte la scène de marchandage sans bruit, Léonte sur les talons et Ivo décontenancé loin derrière ; et reste un instant debout, parfaitement immobile, les pupilles rivées vers l'entrée béante du Crow Club. Asrae se comporte comme un tueur qui se sait dans la ligne de mire d'un autre, et craint d'être abattu au moindre mouvement, chacun pouvant être celui de trop. Le diable est dans les détails, et c'est là ce qui la pousse à une inspection profonde de la toile, à en fouiller les moindres coutures et fragments. Les flammes des lampes à gaz murales brûlent en veilleuse, et dansent une valse langoureuse avec quelques bougies posées sur le rebord de chaque fenêtre. Elles grignotent une nuit particulièrement sombre et sans étoiles à Jhiu N'guri, et il faut plusieurs minutes à Asrae pour soulever le détail qui jure : la douzaine de bougies posées méticuleusement aux abords du Club, et qui signale la mort qui ne s'est pourtant pas présentée. Pas encore. Toute la rue en est ornée. Un frisson d'effroi grimpe dans sa colonne, et ne fait que croitre lorsque Senri lui prend le bras, et qu'elle s'empêche de justesse l'ouvrir de bas en haut. — Les cris, milady. Senri est énigmatique dans ses révélations, comme c'est souvent le cas. Le môme perçoit encore ce que les affres de l'âge abîment. Il lorgne sur la rue, les portes, d'où s'extirpent les nouveaux affranchis et leurs cris de triomphe. Une palpitation rougeoyante dans chaque paume, Senri tremble derechef, alors qu'on annonce fièrement dans la rue la fin de l'asservissement des inaptes à la maitrise et que le feu par lequel ils ont été trop longtemps opprimés se propage d'un foyer à un autre. — Et les murmures. Ses yeux se braquent sur l'intérieur, où les pantins se lèvent, dominés par une ferveur interdite. Asrae distingue enfin les outils et armes de fortune dans les mains sales des valets. — Fabuleux, ce soulèvement. Pile le soir de notre transaction.   Son réflexe primaire est de dégainer son bô, et d'en fourrer l'une des extrémités dans la bouche d'Ivo. Le bougre pousse un cri craintif, et jure qu'il ne sait rien du grabuge de la bouche, qu'elle est folle des yeux. — Dégage, grogne-t-elle entre ses dents, convaincue par le ton, ainsi que l'incompréhension qu'elle peut aisément lire dans ses prunelles, et le simple fait qu'il soit bien trop sot pour instiguer quoi que ce soit de grande envergure. Ivo se tire sans demander son reste et déjà, les vagissements étranglés de maitres fauchés crépitent tout autour. — C'est le grand rouquin. Le dernier élément est sombre dans son sens, et ses yeux se posent sur Léonte, qui saura peut-être plus déchiffrer le petit garçon écrasé de frayeur.
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MessageSujet: Re: the crimson blaze. the crimson blaze.  EmptyLun 18 Juin 2018 - 13:59

Léonte est équitablement soulagé d’abandonner la tractation et soucieux de ce qui s’en vient. Le frémissement grouillant de la foule, les détonations lointaines, tout jette soudain du frisson dans l'échine et dans la chair du dos. Khodja et Oshun se lancent ce même coup d'œil mi sceptique mi pressant ; aucun des deux ne paraît savoir que les rues ou le palais avaient l'intention de s'en donner à cœur joie. Vite, Léonte comprend qu'une chose – même plusieurs – ne va pas. C'est peut-être qu'il a appris à redouter les menaces comme un paysan lorgne de travers les hivers ou c'est qu'il a attendu ce moment de longue date. La paume tombe au fourreau, chatouille les sillons de métal ouvragés dont chaque phalange a la coutume. Il est beaucoup moins prolixe et soudain plus lui-même. Dans le même temps, il n’apprécie guère la complicité taiseuse d’Asrae ; elle non plus n’a aucune idée de ce qu’il se passe et, foncièrement, dans les tréfonds de la ville basse, c’est une qualité que le jeune homme espérait de sa fiancée. Crever ici, les entrailles dégueulées parmi les joints mal fichus des pavés, c’est un refus tout net. Alors il tend l’oreille, inspecte du bout des yeux, ça un genou qui tremble, là une lame qui pointe. En vérité, personne ne semble plus rassuré ou plus certain que son voisin et ce n’est pourtant pas le chahut qui manque dans la capitale.

Bien que le bastion soit Khodja, Léonte ne se sent nullement en sécurité. Au contraire, la lame de leurs sous-fifres serait perfide que cela courrait pour l'ordre des choses. Brièvement, Léonte consulte Asrae qui consulte le jeune Senri. Les questions brûlent les lèvres du jeune Oshun mais, sachant qu'il n'obtiendra que des bribes énigmatiques, il se désintéresse de la congrégation, laisse filer ce malandrin d'Ivo et guigne dans les aperçus de la porte ce qui filera les deux ou trois prochaines minutes de son existence – et peut-être seront-elles les dernières. À discerner les aboiements des mêlés entrelacés d'invectives de lambdas, ils en ont après eux, tous, les maîtres, ensemble. Pas sûr du moment où Léonte comprend réellement qu'on en veut solidement à sa vie, il se tourne à demi vers Asrae et son jeune apprenti : « Allons chez mon père. Il y aura des sentinelles et de quoi savoir ce qui se trame. » Il ne propose pas : il dit qu’il ira. C’est à la fois proche de leur position et suffisamment en retrait dans la partie haute de la ville pour les extirper des coupe-gorges. « Tout de suite. » L’Oshun pousse Asrae devant lui, dont le pas est aussitôt emboîté par le jeune garçon. La maigrelette colonne s’extrait du Crow Club avec des atours d’assassin et de monte-en-l’air mais ils ne font guère plus de quelques pas avant que Léonte ne fiche son premier coup d'épée de la soirée dans une poitrine indistincte mais dont le bras aurait eu tôt fait d'équarrir la sienne d'une coupe transversale.
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