pseudo et prénom ‹ holster, alizé. âge ‹ j'attends d'atteindre celui du christ et je me canonise. comment as-tu trouvé le forum? ‹ c'est lui qui est venu, j'ai rien demandé. pays ‹ france. fréquence de connexion ‹ vous me connaissez, je suis globalement toujours là. votre avis sur le forum ‹ mamamama. smiley préféré‹ j'aime que les memes, déso. gif qui décrit le mieux votre personnage‹

Spoiler:

évoque, suggère. en trois lignes
montre-moi ce masque impassible,
mais toute la douleur par-dessous.
(soundtrack)

Les bottes de l’homme tracent dans la neige un sillon blanc qui le suit et qu’il ne voit pas. Son index entre et sort dans le trou – très exactement à sa taille – de la poche de son manteau qu’il ne sent pas. Les nuages du ciel se regroupent lorsque le vent les pousse les uns contre les autres, se bousculent et s’avalent, un souffle d’air glacial rase la cime des arbres chauves et fait tourbillonner les feuilles à terre mortes. L’homme au par-dessus noir poursuit sa route comme si la nature était induite comme si ça ne le concernait pas n’était pas lui pas une partie de ça. Et en effet, la nature ne l’appelle pas. Un corbeau fend le ciel les ailes grandes ouvertes et c’est comme si l’homme n’était pas là n’existait pas. L’univers poursuit son roulement serein sans grondement. Le corps de l’homme l’accompagne dans le silence irréel ineffable stupide gris. Au coin d’une rue soudain les bottes noires de l’homme en noir s’engagent et les traces dans la neige s’effacent et l’homme disparaît. Le souffle du vent traverse l’espace et vient peupler l’absence de l’homme de la chair du monde du rien. Ne plus être voudrait dire avoir été. Ne pas être c’est avoir pu être. Rien dans le langage n’explique l’absence dévoilée pleine et entière rien ne dit le rien sans y introduire un peu de tout. Comment ne pas. Le dire. Une question. Sans réponse.    

Je ne pourrai témoigner de ma souffrance, car j’ai oublié avoir souffert. Je ne pourrai me souvenir de mon amour, car j’ai oublié avoir aimé. Je ne saurai contrer la violence, car j’ai oublié avoir subi. Je pourrais oublier le monde, aussi soudainement que vous le réalisez, car j’ai oublié de vivre.

— Impossible. Je peux pas être plus clair, Nash. Les mains de Rey se croisent l’une dans l’autre par-dessus la table, ses yeux noirs rivés sans ciller sur ceux de l’homme à barbe grisonnante en face de lui. — Je te demanderais pas ça si le petit avait pas besoin de soins, Reynir. D’un geste las, l’homme désigne un lit unique dans la pièce qui sert à la fois de chambre, de salon et cuisine, et dans lequel dort un enfant d’une dizaine d’année – sans doute moins. Sa peau est blanche comme un linge immaculé, trempée comme après un rinçage efficace. Le regard de Reynir se pose à peine sur lui et revient sur celui de l’homme. — Il faudra te contenter de ce que je te propose. Le rapport n’est pas excellent, mais il est à la mesure de ce que tu me donnes. Sa main attrape à nouveau les petits bijoux de bronze étalés sur le bois usé, et les fait tourner entre ses doigts. La lèvre inférieure de l’homme tremble à peine. — C’est tout ce qui nous reste de la mère d’Anna. Le regard de Reynir vrille du bijou à l’homme. — Qu’est-ce que tu cultives, Nash, des souvenirs ou l’avenir de ton gamin ? L’homme ferme les yeux pour ne les rouvrir qu’après de longues secondes. — Je ne pourrai pas te convaincre de faire un geste. Sa question n’est qu’un renoncement, une sentence faite à lui-même. Reynir sourit en coin. — Les prêtres et les mimes font des gestes. Pas nous. Il se lève et, tandis qu’il domine la table à laquelle est accoudée, pesante, la misère de Nash Reaghan, empoche les bijoux dans les larges ouvertures de son par-dessus noir. Enfin, il sort de sa poche intérieure une petite bourse remplie de pièces, et la dépose sur la table. Jack ne la regarde pas. — Tu peux m’appeler à chaque fois que tu as besoin de moi, dit Reynir en guise de salut. L’enfant s’est réveillé, et observe fixement le prêteur sur gage depuis son lit, à l’abri dans ses couvertures. Ses deux petites mains d’albâtre sortent de chaque côté de son visage, attrapent le tissu du drap et il se redresse tant bien que mal. Sa voix minuscule, Reynir ne l’aurait pas perçue si le silence de la mansarde n’avait pas été aussi clair et pur. — Vous êtes un vert ? Lentement, Reynir se retourne pour poser ses yeux noirs sur l’enfant. Après quelques secondes, il acquiesce sans un mot. Un sourire vient éclairer le visage de mort du gosse et dans ses yeux danse une fierté inconnue. Il lève une main et montre à Reynir un poignet vierge. — Je crois que j’en suis un aussi. Ses yeux plongent dans ceux de Reynir comme pour y trouver une ancre, une simple vague sur laquelle déposer un message dans une bouteille, capable de l’emporter au large. Mais Reynir a déjà détourné le regard et, le temps d’un battement de cils, il n’est plus là.

the things i will do. what they are, yet i know not
but they will be the terrors of the earth. you don't know where you are, do you ?
you're in a prison of your own sins.
(soundtrack)

Tous les jours se ressemblent, se reflètent les uns les autres dans une marre d’infini plat. Tu crains l’oubli, aussi sûrement que tu oublies que ce sera toujours à l’oubli de te craindre, te fuir et se cacher de toi de ton esprit aux lianes immenses aux pupilles béantes capables de tout avaler sans même s’y poser. Tu es devenu l’oubli, pour te craindre et pour te fuir, pour t’éviter ce reflet étranger sur lequel tes yeux ne veulent pas se river. Que deviendra ton monde lorsque tu te décideras à te souvenir ? Comment tomberont les pièces de ton labyrinthe écroulé, comment étoufferont les êtres qui te peuplent dans la noirceur de tes caveaux enfouis ? Je vois une aube rouge éclatante, un omagatoki aux veines éclatées giflant les ténèbres d’un monde ensanglanté. Rien de moins nouveau que ta réminiscence, souvenir de ton souvenir, reflet de tes reflets perdus réapparus pour te hanter te porter jusqu’au trône sacré de ta
reconnaissance.

« Meurs », murmure Liet Sydow dans un sourire doux à la tendresse tiède. Ses lèvres s’étirent et emportent dans leurs remous ses pommettes creuses gonflées comme une montagne naissante baptisée dans la neige blanche de sa peau, plisse ses yeux aux rayons amoureux. D’un doigt, il caresse sa joue y trace un sillon éternel que seule la glace peut offrir à la terre, et murmure à nouveau tout contre son oreille presque étouffé par son rire muet sa jouissance secrète, évanescente et infinie-parfaite, « meurs ».

— Qu’est-elle venue faire ici ? Retrouver qui ? La voix de Liet Sydow n’est qu’un murmure quasi inaudible. Quant à l’homme qui lui répond, personne ne l’entend à l’exception de Liet. — Elle n’est quand même pas venue pour… lui ?... Après des secondes de silence durant lesquelles le visiteur de Liet parle ou se tait, un rire étranglé s’échappe du ventre du prêteur sur gage. — C’est stupide… Tellement stupide… Exalté, il claque ses mains l’une contre l’autre. — Excellent. Évidemment, je m’en occupe. Ça fait longtemps, trop longtemps que Rey n’a pas travaillé sur son bon vieux symptôme. Reynir ne revient dans la villa qu’à la nuit tombée, des heures après le départ du visiteur tout droit venu du Palais des Flammes. Sombre, comme à son habitude, il retire sa cape perlée de gouttes de pluie et la suspend. Un lambda l’emportera sûrement pour la sécher près d’un grand feu de cheminée. Célie informe sa mine exténuée que le Dr Sydow l’attend dans l’antichambre. Il traverse d’un pas régulier la villa glaciale, et ouvre les battants de bois qui le séparaient de Liet. — Rey ! Affalé dans son gros fauteuil de soie pourpre, Liet se dore auprès d’un feu majestueux, dressé dans l’immense cheminée de pierre qui lui fait face. Il écarte ses deux bras, en signe d’affabilité, manière d’inviter Liet à le rejoindre et prendre place sur le fauteuil d’à côté. — Rey, mon vieux, sers-toi un verre et fais comme moi, oublie l’hiver. Silencieux, Reynir attrape un verre de cristal à pied haut entre ses doigts, et y verse une quantité moyenne de vin doré ; l’un des préférés de son maitre, à l’odeur enivrante et au goût sucré écœurant. — Comment se porte ce bon vieux Syd ? Sans avaler une gorgée, Reynir s’assied sur le second fauteuil et observe son maitre, sa coupe inerte suspendue à sa droite. — Il te salue, et t’informe que tes nouveaux taux de change assassinent ses finances. Liet éclate d’un rire de gorge, comme s’il s’agissait du trait d’esprit le plus grossier et le plus divin de l’année. — Comme si ce fils de pute avait besoin de moi pour se saboter. Qu’est-ce qu’il faut pas entendre. Puis Sydow tourne sa tête en direction de son adiutor et entame une longue observation, de celles dont tout être normal finirait rapidement par se sentir mal à l’aise, mais que Reynir supporte comme s’il était une peinture sur toile dans un musée. Liet le regarde fixement, lentement, inspecte chaque milimètre de sa peau, se penche sur chaque pore. Il sentirait, verrait le plus infime changement d’expression, la première ride naissante avec la minutie d’un sculpteur face à son œuvre. — J’ai une bonne et une mauvaise nouvelle, Rey, et tu vas voir, c’est marrant, elles portent toutes les deux le même nom. Reynir lui adresse une mine polie et circonspecte en guise d’intérêt. — Asha Verhoffin. Il a sifflé le nom entre ses dents, pressant la pointe de la langue contre le haut du palais, ménageant son effet. Effet immédiat : le rien peint ses couleurs sur le visage impassible de Rey. Un clignement de cils vient confirmer à Liet qu’il n’a rien compris. — Oui ? Non ? Non, oui ? Reynir secoue la tête. — De quoi s’agit-il ? C’est un prénom et un nom ? Un sourire sinistre mais satisfait vient ourler les lèvres de Liet. — La mêlée idiote d’Andrei Valaeris a tenté de s’infiltrer ici pendant ton absence. Que cherchait-elle, d’après toi ? Il y a une lueur de perversion dans le regard de Liet Sydow, que Reynir interprête comme sa couleur habituelle, son iris plein. Une teinte à laquelle il est souvent éclairé, comme on l’est par une bougie qu’on tient dans la main une nuit de ténèbres. Après quelques secondes de réflexion songeuse, Reynir se risque à une interprétation. — Tu es un maître de la terre. Un des seuls à être resté à Launondie depuis le couronnement Griffith. De quoi éveiller certains soupçons du côté d’Eartanera, je n’en doute pas. Liet l’observe un moment encore par-dessus ses paroles, avant de sourire. — Bien. C’est bien, mon Rey, dit-il d’une voix doucereuse, dont le miel est immédiatement identifié par Rey comme une projection de contentement et d’absence de violence. Son rythme cardiaque s’apaise quelque peu et il se détend, du moins plus qu’avant. — J’ai eu Paulson, de la Commission des Mêlés. J’ai l’autorisation officielle de l’interroger moi-même pour le compte de la sécurité de l’état. Satisfait de se remémorer la finesse de ce jeu de relations, Liet écrase ses deux mains à plat contre son ventre de femme enceinte jusqu’au cou. — Elle se trouve actuellement dans la salle d’expérimentation Archimède, celle qui est entièrement vide – c’est une bleue, tu comprends, à part se faire léviter toute seule, elle ne doit rien pouvoir déplacer. Reynir acquiesce en silence, ses yeux noirs toujours posés sur son maitre. Le voilà qui s’anime soudain, théâtral à en vomir, sursautant sur lui-même et se tournant vers son esclave, les yeux ronds comme deux billes translucides. — Et après tout, Rey, pourquoi pas ? Après toutes ces années, toi et moi, toutes ces expériences… Pourquoi ne pas te faire passer de l’autre côté ? N’as-tu pas appris de moi ? N’as-tu pas observé, singé ? Quand je vois ta maitrise du commerce de prêt, les progrès que tu as accomplis en si peu d’années… J’ai pris ma décision. C’est toi qui va la faire parler. Vois-tu, j’ai hésité. Je veux te protéger, te conserver tel quel – il me semble que tu as pris à ce jour une forme d’imperfection, disons, parfaite. Sa main épaisse se soulève, puis s’éclate contre sa cuisse en un plaf sonore. — Et merde, Rey ! Toi aussi, tu dois pouvoir t’amuser. Toi aussi, tu dois avoir le droit, de temps en temps, de jouer au docteur. Ce sera toi, mon grand. Il cligne d’un œil bienveillant et lui adresse un sourire, encore un savamment pioché dans la palette émotive à laquelle Reynir est conditionné depuis l’enfance. — Utilise tous les moyens qui te viendront à l’esprit. Tu as, comme qui dirait, carte blanche. Il se penche alors sur l’adiutor, histoire de le mettre dans la confession. — Profite-s-en si tu le souhaites pour mener tes propres expériences. Ce sera notre petit secret… Son œil vert luisant disparait dans le clignement coquin qu’il lui adresse en maitre généreux, empli d’une bonhomie bienveillante un peu polissonne, masquant son poison que, de toute façon, le regard de Reynir a avalé cent fois déjà.



*haïku en citation de julien vocance, quote de westworld.